Dialogue entre un défenseur de la vie humaine et un prédicateur.

Brésil : les trois valeurs « non négociables » pour les catholiques (I).
23778822.jpg
Dialogue entre un défenseur de la vie humaine et un prédicateur.

Propos recueillis par Thácio Siqueira

Traduction d’Océane Le Gall

ROME, jeudi 6 Septembre 2012 (ZENIT.org) – Il y a, dans la société, pour les catholiques, « trois types de valeurs non négociables », explique le P. Paul Ricardo.

La légalisation de l’avortement prévue dans le projet de réforme du Code pénal du Brésil, inquiète la communauté catholique du pays.

ZENIT a organisé à ce sujet une conversation entre le professeur Paulo Fernando Melo, vice-président du mouvement pour la défense de la vie humaine te de la famille et membre du comité de bioéthique de l’archidiocèse de Brasilia, et le P. Paulo Ricardo Azevedo Jr, du diocèse de l’archidiocèse de Cuiabá, célèbre pour ses prédications.

Prof. Paulo Fernando - Comment voyez-vous la situation de la communauté catholique, de la société en général, face à la légalisation de l’avortement prévue dans le projet de réforme du Code pénal ?

P. Paulo Ricardo - Le catholique est malheureusement tenu à l’écart de la vie politique. Parmi les catholiques il s’est créé une mentalité selon laquelle, sous prétexte que l’Etat est laïc, les personnes ne peuvent exprimer, en politique, leurs valeurs éthiques et religieuses. Cette mentalité est complètement absurde, car nous savons bien que chaque loi est la manifestation d’un ethos, d’une vision du monde et d’un tableau de valeurs.

L’Etat a beau être laïc, les Brésiliens sont des personnes religieuses. Ils ont non seulement le droit mais le devoir aussi d’apporter leur ethos à la rédaction des lois. Maintenant, à cause de cette idéologie laïciste, le catholique se perçoit comme une sorte de minorité. Il est religieux, a ses convictions, mais c’est comme s’il était un citoyen de seconde classe. Il n’a que le droit de manifester ce qui est athée, matérialiste militant ... le catholique est mis de côté.

Oui, nous devons réveiller le catholique conscient, convaincu, pratiquant, fidèle à l’Eglise et au Pape, pour sa mission, sa vocation dans le monde de la politique.

Le diable a vraiment fait du bon travail. Il a mis dans la tête du catholique que la politique est pour les gens soncha, pour les personnes sonchas (un terme régional désignant une personne sans caractère, ndlr) et qu’ils n’ont donc pas à s’en mêler. Ainsi, au Brésil, nous avons une situation assez étrange  d’une majorité silencieuse qui est gouvernée de manière presque dictatoriale par une minorité qui a réussi à mettre un bâillon à cette majorité.

Prof. Paulo Fernando - Père, nous sommes dans une année électorale pour les préfets et les assesseurs. Que dit la doctrine sociale de l’Eglise sur la participation des catholiques à la vie politique ? Quels sont les critères d’un bon candidat?

P. Paulo Ricardo - A vrai dire, il ne faut jamais perdre de vue que l’Eglise n’a pas de candidats à elle, mais qu’elle oriente les fidèles à choisir les candidats qui oeuvrent au bien commun : des hommes et des femmes qui ont une histoire et des compétences pour travailler pour le bien commun. Cette réalité  a une forte incidence quand nous regardons le curriculum d’un candidat et qu’ils sont proches des valeurs que le pape Benoît XVI considère comme non négociables.

On compte, dans l’ensemble, trois types de valeurs non négociables. Le pape les a cités dans un discours au Parti populaire européen en 2006. D’abord : le respect de la vie humaine, dès sa conception jusqu’à sa mort naturelle. Là entre toute la question de l’avortement, de l’euthanasie etc. Deuxièmement: la famille, fruit d’un mariage monogamique, unique, indissoluble, entre un homme et une femme. Cette valeur-là, l’Eglise la considère non négociable. C’est-à-dire que là, l’art de la politique ou de la négociation n’à rien à voir. Et troisièmement : l’éducation des enfants, soit la liberté des parents d’éduquer leurs enfants sans interférences de l’Etat sur la nature des valeurs à leur transmettre.

Ces trois colonnes portantes sont déjà attaquées de plein fouet par l’avortement, par l’homosexualité, par le féminisme, et par un Etat de plus en plus conditionné par les militants de  gauche qui veulent justement saper ces colonnes portantes de la moralité présente dans la civilisation occidentale, qui n’est pas seulement quelque chose qui est propre au catholique ou au chrétien, mais qui sont des valeurs sur lesquelles s’est construite la civilisation occidentale.

Prof. Paulo Fernando - Est-ce qu’un électeur qui fait le choix de voter pour un candidat ou un parti qui, il le sait bien, va contre les valeurs que vous venez de citer – par exemple quand le parti défend dans son programme la légalisation de l’avortement – commet-il un péché?

P. Paulo Ricardo - En effet, cette question est assez délicate au Brésil, car presque tous les partis, dans leurs plateformes, dans leurs programmes, ont des politiques qui vont contre ces valeurs. Plutôt que de nous préoccuper de savoir si ces partis ont ou n’ont pas ce type de valeurs, nous devrions plus nous soucier de savoir si ce parti permet ou ne permet pas au candidat d’exercer librement son mandat sur la base des valeurs qu’il professe. De manière à ce qu’il n’y ait pas une rigueur ou une discipline à l’intérieur du parti qui impose aux candidats, une fois élus, une camisole de force doctrinale.

Donc, dans ce cas, si une personne sait que le parti a ce type de discipline interne, et qu’il ne permettra donc pas au candidat d’exercer son mandat selon les valeurs qu’il professe, alors l’électeur a sa conscience sérieusement compromise au moment du vote, car il sait qu’il est en train de voter non pas pour un candidat avec des valeurs chrétiennes, mais pour un parti qui imposera ses valeurs immorales et antichrétiennes.

Je souhaite envoyer cette information á un ami

 

 
Brésil : les valeurs « non négociables » pour les catholiques (II et fin).

 

bresil1.jpg
Dialogue entre un défenseur de la vie humaine et un prédicateur.

Propos recueillis par Thácio Siqueira

Traduction d’Océane Le Gall

ROME, vendredi 7 Septembre 2012 (ZENIT.org) –  La légalisation de l’avortement prévue dans le projet de réforme du Code pénal du Brésil, inquiète la communauté catholique du pays, car la vie humaine, la famille, le mariage sont des valeurs « non négociables ».

Voici la deuxième partie de la conversation que ZENIT a organisée à ce sujet entre le professeur Paulo Fernando Melo, vice-président du mouvement pour la défense de la vie humaine et de la famille et membre du comité de bioéthique de l’archidiocèse de Brasilia, et le P. Paulo Ricardo Azevedo Jr, du diocèse de l’archidiocèse de Cuiabá, célèbre pour ses prédications.

 

Prof. Paulo Fernando - Que peut faire un citoyen catholique face à cette culture de la mort?

P. Paulo Ricardo - Nous devons rappeler deux choses importantes. Tout d’abord que nous ne sommes pas une minorité insignifiante, mais une majorité, hélas, en sourdine, car contaminée par la mentalité antichrétienne, et mal articulée, pas organisée. Une fois avoir pris conscience de la situation que nous vivons, il nous faut être prêts à nous articuler et à travailler de manière spécifique pour ce genre de politique favorable à la vie. Nous devons avoir foi en l’action de Dieu dans l’histoire,  avoir à l’esprit que c’est toujours une action qui – pouvant être comparée à celle d’un petit David luttant contre un Goliath – se termine par une victoire.

Donc, il existe en nous la conscience de notre petitesse. Même si nous sommes nombreux, nous savons que toute victoire remportée, quelle qu’elle soit, doit être une victoire de Dieu, laquelle ne se réalise que lorsque nous agissons. Quiconque travaille dans ce domaine, dans l’évangélisation, au milieu de la politique et de l’action sociale, quiconque travaille pour les choses de Dieu, a déjà pu constater que nos petites actions sont énormément renforcées par Dieu, en ce sens qu’elles sont bénies, même si, en politique, rares sont les chrétiens et les catholiques qui en ont conscience.

Dieu nous donne la grâce. Nous pouvons donc compter sur Lui. Nous pouvons compter sur le fait qu’un petit caillou peut être le déclencheur d’une grosse avalanche, que le petit David peut toujours anéantir l’armée des Philistins.

 

Prof. Paulo Fernando - Vous avez dit que Dieu nous demande de lutter, pas de triompher, puisque la victoire est déjà acquise par Jésus. Quel conseil donneriez-vous aux personnes qui se sentent appelées à cela, qui sont préparées, qui recouvrent déjà un rôle de père de famille, d’employeur, d’employé, de personne engagée dans leur communauté? Ne manque-t-il pas en effet souvent un stimulant pour que des chrétiens formés adéquatement s’engagent dans le monde de la politique ?

P. Paulo Ricardo - Le début de la sagesse est la crainte de Dieu, disent les Saintes Ecritures. Nous devons être pleinement conscients du fait que nous ne sommes pas dans ce monde pour vivre  à notre convenance et vivre le paradis sur cette terre. Nous sommes ici pour préparer le ciel. Nous sommes ici pour accomplir la volonté de Dieu qui a préparé pour nous un bonheur au ciel. Donc, celui qui entre dans cette lutte sans croire au salut de Dieu, et sans espoir de l’atteindre, est une personne qui a une grande probabilité de sortir perdant de cette lutte, car l’ennemi nous attaque.

L’ennemi – et notre plus grand ennemi c’est Satan, le diable, et non les gens – compte sur le fait que nous, épouvantés, nous vivions un christianisme « bourgeois », de « confort », où oui, je fais la volonté de Dieu, mais uniquement quand cela ne me coûte pas trop. Dès l’instant où la fidélité à Dieu commence à demander un prix, les personnes renoncent. Les conseils que je peux donner  très concrètement à tous les chrétiens, laïcs, prêtres, c’est de tenir les yeux fixés sur Dieu, pour ne pas se laisser distraire par les flatteries du monde, par ce qui nous « arrange » sur cette terre.

Nous sommes ici pour lutter et nous savons que Dieu triomphera. Que Dieu triomphera ne fait aucun doute. La seule question est: de quel côté serons-nous quand Dieu aura obtenu victoire? De quel côté serons-nous quand Il proclamera sa victoire ?

Nous devons vivre ce monde les yeux rivés au ciel. Sachant que notre mission est d’être sur terre et de préparer notre ciel. Tout ce qui nous distrait de cette réalité est comme une « trahison ». Nous devons savoir qu’un jour nous serons face au trône de la grâce, que Dieu nous jugera. Nous devons lui être fidèle.

 

Prof. Paulo Fernando - Dans vos considérations finales, vous dites que nous devrions prier pour la conversion des partisans de l’avortement? Quelles devraient etre nos intentionsde prière pour lutter contre la culture de la mort?

P. Paulo Ricardo - La réalité spirituelle doit toujours être ancrée à l’action. Les deux choses doivent marcher ensemble: prier pour leur conversion, prier pour les familles, pour les femmes, les enfants, les personnes impliquées dans les crimes de l’avortement. Mais surtout nous ne devons pas perdre de vue le fait qu’au Brésil nous vivons en ce moment deux réalités d’une urgence extrême.

La première est toute une action du pouvoir exécutif, où le ministère de la Santé et le secrétariat pur la défense des droits des femmes sont en train de mettre en œuvre une série de procédures pour faciliter l’avortement pharmacologique. Nous avons affaire à un projet de code pénal qui, s’il ne légalise pas totalement l’avortement, mitige considérablement la peine pour l’avortement, transformant sa pratique en une infraction mineure, et donc non passible de punition.

Ces deux réalités constituent un vrai coup à la démocratie brésilienne. Nous, Brésiliens, nous sommes, en majorité, contre la pratique de l’avortement et nous voudrions qu’il en soit toujours ainsi. La valeur de la vie humaine est un droit non négociable, c’est une chose sur laquelle on ne peut pas transiger. Cette réalité doit être défendue par les catholiques, tout d’abord en priant, en reposant notre confiance en Dieu, et en nous abandonnant à la Vierge, mais aussi en agissant , en étant prêts à payer le prix de notre fidélité au Seigneur.

Un auteur protestant, C. S. Lewis, a écrit un livre intitulé « Tactique du diable » (Lettres d’un diable à son apprenti), où un démon plus âgé enseigne au démon plus jeune comment conduire une âme en enfer. Il dit ceci: garde ses prières (celles de la personne qu’il veut conduire à l’enfer) très dévotes et spirituelles, faisant en sorte que celui-ci n’ait jamais à se préoccuper des maux de ceux qui sont autour de lui, de leurs exigences spécifiques et de l’aide qu’il pouvait porter aux personnes vivant dans le besoin.

Nous devons donc prier, nous en remettre à Dieu, mais nous devons aussi agir. Cette petite action de millions de petits David sera renforcée par Dieu qui, par sa grâce donnera la victoire à son peuple.

 [La première partie de cet entretien a été publiée hier, jeudi 6 septembre 2012].

Je souhaite envoyer cette information á un ami

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

Ajouter un commentaire